Titre original : Avenue des géants
Ecrit en : 2012
Editeur : Gallimard
Paru en France en : 2012
368 pages
ISBN : 978-2-0701-3235-5
Al Kenner est un petit génie au QI supérieur à celui d'Einstein, bridé par une mère qui le déteste et un père qui le délaisse pour satifaire sa nouvelle épouse. Elevé par une grand-mère tyrannique, il la tue, ainsi que son grand-père, alors qu'il n'a que 15 ans. Jugé irresponsable, il est enfermé en hôpital psychiatrique d'où il ressortira cinq ans plus tard. Pendant des années, il va mener une vie plus ou moins normale, luttant contre la folie, parfaitement conscient de ses actes, comme il l'a toujours été, allant jusqu'à travailler pour la police.
C'est pourtant bien en prison, âgé de 49 ans, que le lecteur découvre Al Kenner dans le premier chapitre.
Ce roman est le récit de sa vie.
Marc Dugain s'est inspiré d'un vrai tueur en série pour écrire son roman : Edmund Kemper. Alors pourquoi parle-t-on seulement d'inspiration, plutôt que de biographie ? Honnêtement, j'en sais rien, vu que c'est bel et bien l'histoire de l'américain, telle qu'on la connait. Je suppose que ça doit tenir à une question de droit, l'auteur français n'ayant pas dû avoir d'autorisation officielle pour écrire une biographie, ou n'ayant pas rencontré le tueur. Je trouve ça un peu dommage...
D'abord, j'ai eu un souci avec la narration. Les chapitres concernant le vieux Al sont écrits à la troisième personne du singulier, puis ceux à propos du jeune à la première personne. Et dans ses premières années en hôpital psychiatrique, qui correspond à un tiers du roman, le texte se compose principalement de dialogues dans lesquels Al raconte sa vie à son médecin. Au final, on a trois modes de narration différents pour un même personnage et un même récit.
C'est assez déroutant et gêne la lecture pendant un moment, jusqu'à ce qu'Al quitte l'hôpital, en fait.,et qu'on arrête les monologue du narrateur sous forme de dialogue.
Ensuite, j'ai eu un souci avec certains propos. Les personnage est un tueur en série qui a assassiné sauvagement plusieurs femmes avant de les violer (A noter qu'Edmund Kemper continue de nier ces derniers faits). Il a commis son premier meurtre à l'âge de 15 ans, sur sa propre famille...
Pourtant aujourd'hui, cet homme prêche la non-violence dans les écoles, fait la lecture aux aveugles, écrit des livres et dispose de certains avantages. Cet homme a tué et il en est récompensé. Là, c'est une conviction personnelle que j'exprime, qui n'a rien à voir avec le livre puisque l'auteur ne fait que rapporter des faits réels. Ce qui m'a gênée dans le récit, c'est que j'ai eu l'impression que l'auteur tentait de lui trouver des excuses, de trouver des justifications à ses actes.
Enfin, l'histoire est assez ennuyeuse. On suit un homme qui n'éprouve aucune émotion, qui ne fait pas grand chose de sa vie et qui parle peu. L'auteur essaie de nous présenter son personnage comme un homme en souffrance, une coquille vie qui souffre de son manque d'empathie et lutte contre des pensées perverses. Malheureusement, rien n'est développé, rien n'est détaillé. Marc Dugain reste trop en surface. On ne sait même pas ce que sont ces mécanismes de défenses pervers dont le narrateur ne cesse de nous parler.
Et Al Kenner a beau être un tueur, nous n'assistons à aucun meurtre : autrement dit, il ne se passe rien, le spectateur est simple spectateur du vide.
La fin relève un peu le récit dans ce qu'elle oppose le personnage creux et vide qu'on a suivi tout au long du récit à la violence et la perversité de ses meurtres révélés comme un cheveu sur la soupe à la fin du roman, mais cela ne suffit pas à susciter l'intérêt du lecteur pour un récit lent et insipide.